mercredi 21 mai 2008

Des changements à Cuba? Le point de vue des anarchistes du Mouvement Libertaire Cubain

Les camarades d'À voix autre nous faisaient entendre une voix que l'on n'entend pas souvent: celle des anarchistes cubains.

Des changements à Cuba ? Le point de vue des anarchistes du Mouvement Libertaire Cubain

Les récentes « ouvertures » du régime cubain laissent sceptiques les anarchistes cubains en exil. Dans le texte ci-dessous, ils nous font part de leurs interrogations.


Face à ce qui se passe dans l’île ces derniers temps, le Mouvement Libertaire cubain - MLC (groupe affinitaire de l’anarchisme cubain à l’extérieur) se fait entendre pour donner une réponse aux interrogations et défis qui sont posés, aujourd’hui, à la société cubaine, ceci sans compromis aucun avec la liberté, l’égalité et la solidarité comme l’ont toujours historiquement soutenu les anarchistes cubains.

Oui, quelque chose paraît avoir commencé à sentir autrement à Cuba ; une fragrance dans l’air du temps de l’ère post-Fidel. Déjà, pour le moment, cette éloquence qui occupait tout l’espace et ce jusqu’au 26 juillet 2006 n’est plus présente comme elle l’a été pendant presque un demi -siècle. Depuis lors, le « commandant » abattu a commencé à écrire, mais on sait déjà que l’écriture n’exerce pas le même envoutement que la parole et moins encore quand elle sera élusive, erratique, et manque d’intérêt pour celui qui se tient en dehors de la célébration du culte. Peut-être est-ce pour cela que sont plus nombreux que l’on pouvait le prévoir ceux qui montrent aujourd’hui dans des rues et les places, dans des vidéos à la dérobée et dans des blogs « faits maison », un désir suggestif de libérer de ses liens la parole des gens eux-mêmes. Les vieux commentaires confidentiels et prudents du passé se sont transformés aujourd’hui en une clameur qui atteint jusqu’aux premiers violons de l’orchestre gouvernemental qui n’ont d’autre alternative que de reconnaître certains états de fait ce qui était impensable quelques années plus tôt. Le vice-président Carlos Lage, par exemple, a dit récemment au VIIème congrès de l’Union Nationale des Écrivains Cubains (UNEAC) : « La double morale, les interdictions, une presse qui ne reflète pas notre réalité comme nous le voulons, une inégalité que nous refusons, des infrastructures détériorées, sont les blessures de la guerre, mais d’une guerre que nous avons gagnée. » C’est un langage de transition, sans doute, parce qu’ils ne peuvent maintenir encore très longtemps l’air final du triomphalisme de guerre pour ensuite admettre des blessures qui sont trop, beaucoup trop importantes pour un régime politique qui a été conçu et se présentait au monde comme « révolutionnaire » et comme « socialiste » ; y compris en acceptant que la victoire guerrière ne serve à une autre chose que le maintien de l’élite du pouvoir.

Plus direct et pointu que celui de Lage a été, par exemple, le langage utilisé par Alfredo Guevara (le cinéaste cubain Alfredo Guevara, un des fondateurs du Nouveau Cinéma Latino-américain et président du Festival de La Havane, écrit ses mémoires) dans le congrès mentionné de l’UNEAC, en s’en prenant aux bastions mêmes de la fierté « révolutionnaire » telles que les réalisations éducatives. Sur ce sujet, Guevara s’est demandé : « Comment l’école primaire comme la secondaire sont-elles arrivées à être régentées par des critères insensés et ignorants des principes pédagogiques, psychologiques élémentaires, et violateurs de droits familiaux, renonçant à être formatrices des enfants et adolescents, et par conséquent fondatrices du futur ? » Il a ajouté que « rien ne pourra jamais être construit solidement à partir de dogmes, d’obstination, d’ignorance de la réalité vraie, ou en ignorant les lanceurs d’alertes de l’expérience et des citoyens ». Un clair exemple de désaccord voire de regret que Guevara a rapidement étendu au monocorde Institut cubain de Radio et Télévision - placé sous la supervision directe du Département Idéologique du Parti Communiste – dépendance qualifiée « de moyens de communication néo-coloniaux avec une programmation bêtifiante et dominés par une ignorance tellement extraordinaire qu’ils ne se rendent pas compte qu’ils se font les alliés du capitalisme avec une dialectique aussi grossière » Ces discours, cependant, malgré leur virulence et de leur charge de constatations amères, n’arrivent pas encore à pénétrer dans la critique de fond du pouvoir ni à mettre en évidence qu’il est en survie.

Vieux parfums dans des flacons nouveaux ?


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1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'avoue que c'est rare qu'on a l'avis des exilés cubains anarchistes. Moi qui croyait qu'il n'y avait que de vieux réactionnaires de droite affilié à la mafia! ;)