mercredi 30 janvier 2008

Cinéma: Il y aura du sang

Rares sont les films provenant d’Hollywood qui nous démontrent les effets pervers de la quête de richesse. «Il y aura du sang» est l’un de ceux-là. Ce film réalisé par Paul Thomas Anderson (Magnolia), met en scène la déshumanisation frappante de Daniel Plainview, un prospecteur incarné par l’acteur irlandais Daniel Day-Lewis. Car sous une façade bienveillante, se cache un véritable monstre.

L’histoire se passe dans l’Ouest américain au 20ème siècle. Daniel Plainview décide de devenir prospecteur, car il s’agit d’un moyen rapide de faire de l’argent, si des puits de pétrole sont découverts et exploités. Celui-ci adoptera le fils de l’un de ses compagnons de travail mort dans un accident de travail, dans le but d’attendrir les gens qu’il doit convaincre de lui céder leurs terres, à des prix risibles.

L’arrivée de Daniel dans une petite communauté afin d’y exploiter un important gisement de pétrole ne se fera pas sans heurts, car il entrera directement en conflit avec un jeune prêtre fanatique, du nom d’Eli. Ce dernier exigera qu’une partie des profits réalisés par l’exploitation pétrolière servent à son église, ce à quoi Daniel finira par consentir, à contrecoeur. Nous assistons donc durant le film à un véritable duel entre les deux hommes, qui s’humilient à tour de rôle.

Comme il a été mentionné au début de ce texte, nous assistons à la perte d’humanité (et de cœur) de Daniel Plainview. Une scène particulièrement frappante et éloquente est celle où celui-ci s’exclame de la découverte de l’immensité du gisement pétrolier, survenue après un incendie ayant été causé par un accident, qui a durement affecté son jeune fils, celui-ci en étant devenu sourd. Cette scène est déstabilisante car en tant que spectateur, nous nous rendons compte que pour cet homme, sa quête d’un maximum de profits est de loin beaucoup plus importante que son fils. Ce constat revient d’ailleurs vers la fin du film, lors d’un face à face cruel.

C'est un film à voir, pour la qualité du scénario et aussi pour les solides performances offertes par Daniel Day-Lewis et Paul Dano, celui incarnant le prêtre fanatique.

Refusez toute hausse abusive de loyer !

En cette période des hausses de loyer, la Coalition régionale pour le droit au logement invite les locataires à être vigilant-e-s devant les augmentations supérieures aux indices publiés par la Régie du logement.

Les hausses recommandées pour 2008

Les taux d’ajustements annuels publiés par la Régie du logement permettent aux locataires de vérifier la validité de la hausse exigée. Si l’augmentation fixée par le propriétaire est supérieure aux indices publiés, les locataires ont le droit de la refuser. Ainsi, pour les logements chauffés par les locataires, la Régie du logement recommande une augmentation de 0,7 %. Dans les cas où les coûts de chauffage sont assumés par les propriétaires, les hausses suggérées sont de 0,8 % pour les logis chauffés à l’électricité, 1,3 % pour ceux alimentés au mazout et 0,5 % pour les logements chauffés au gaz naturel.

Outre les frais liés au chauffage, d’autres déterminants sont pris en considération pour ajuster les coûts des loyers, notamment les réparations effectuées et la variation des taxes foncières. Dans le cas des travaux majeurs, le taux d’ajustement appliqué aux dépenses s’élève à 4,3 %. Ainsi, ces derniers peuvent entraîner une augmentation additionnelle de 3,58 $ pour chaque tranche de 1000 $ de travaux, qu’il faut diviser par le nombre de logements concernés. Quant aux taxes foncières, un montant supplémentaire de 0,7 % doit s’ajouter pour chaque tranche de hausse de taxes de 5%. Pour connaître le taux de variation de taxes de votre immeuble, informez-vous auprès de votre bureau d’arrondissement ou sur le site de la Ville. La Coalition régionale pour le droit au logement dénonce toutefois le fait que dans les cas où les taxes foncières sont réévaluées à la baisse, les propriétaires concernés n’offrent pas nécessairement une diminution du loyer des locataires.

(N.B.: la Régie propose en ligne un formulaire de calcul)

Contactez le groupe de votre quartier!

Dans tous les cas, la Coalition pour le droit au logement recommande aux locataires de s'adresser au Comité logement ou à l’Association de locataires de leur quartier afin de les appuyer dans leurs démarches. Les locataires peuvent contacter le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste en haute-ville (522-0454), les Comité des citoyen-ne-s du quartier Saint-Sauveur en basse-ville (529-6158), le Comité logement d'aide aux locataires à Sainte-Foy (651-0979), le Bureau d'animation et information logement (523-6177) partout ailleurs dans la région et l’Association coopérative d’économie familiale de la Rive-Sud de Québec (835-6633).

(Ailleurs en province, le FRAPRU propose une liste de comités logement.)

20ème anniversaire de la décriminalisation de l’avortement au Canada

Il y a vingt ans, les femmes du Québec et du Canada faisaient un pas de géant. En effet, la cour suprême du Canada rendait un jugement historique dans la cause du docteur Henry Morgentaler, accusé avec deux autres médecins de pratiquer illégalement des avortements dans sa clinique de Toronto. C'est donc depuis le 29 janvier 1988 que l'avortement est décriminalisé au Canada. Plusieurs organisations féministes ont voulu souligner à leur manière l'occasion (voir cette lettre collective ou ce site spécial par exemple). De notre côté, nous avons publié dans notre journal un bref texte sur l'état des lieux au Québec.

Avortement au Québec : libre et gratuit?

La liberté pour une femme de choisir d’avoir des enfants ou non est une des revendications les plus fondamentales du mouvement féministe. La lutte pour la légalisation de l’avortement, puis pour sa plus grande accessibilité, a été un moyen concret de remettre en question le contrôle sur le corps des femmes que la société accordait traditionnellement aux hommes.

Même si l’accessibilité aux services d’avortement gratuits est meilleure au Québec que dans le reste du Canada et aux États-Unis, certains obstacles se présentent encore aux femmes qui choisissent de se faire avorter en 2008.

Vingt-quatre pourcent des hôpitaux du Québec (16% au Canada) pratiquent l’avortement, en plus des CLSC et des Centre de santé des femmes. En 2006, les délais d’accès à ce service ont été jugés «déraisonnables» par le Ministre de la Santé et les tribunaux ont décrété que le gouvernement ne respectait pas la Loi sur l’assurance maladie en ne remboursant qu’une partie des coûts des avortements pratiqués dans les cliniques privées à cause des trop longs délais. La loi a depuis été changée, mais elle n’est toujours pas appliquée et des femmes doivent encore payer jusqu’à 300$ pour se faire avorter.

Dans toutes les grandes villes d’Amérique du Nord, on trouve maintenant des centres de conseil sur la grossesse qui sont non-gouvernementaux et à but non-lucratif. Certains de ces centres ont malheureusement été fondés par des groupes anti-choix afin d’y dissuader les jeunes femmes de se faire avorter. Sous des noms trompeurs du genre «urgence-grossesse» («crisis pregnancy centers»), ils fournissent de l’information fausse ou partielle sur la croissance des foetus et sur l’avortement. Certains de ces centres vont même jusqu’à chercher à retarder les démarches d’une femme qui choisit l’avortement dans le but de le rendre impossible. Ce phénomène est particulièrement bien documenté aux États-Unis et au Canada anglais.

À première vue, il peut être difficile de savoir si un centre de ressource a pour mission de présenter de l’information objective et d’aider les femmes qui tombent enceintes ou bien s’il a pour mission de faire le contraire (la présence de bibles et de crucifix peut être un indice de cette seconde possibilité). Il est possible de recevoir des renseignements authentiques et de l’aide dans les CLSC, dans les Centres de santé des femmes ou encore à l’Association canadienne pour la liberté de choix ( 1-888-642-2725).

L’éducation sexuelle est importante quand il s’agit de santé sexuelle et de prévention des grossesses non désirées. Or, en 2003, Santé Canada a subventionné une étude qui a révélé que les jeunes avaient généralement de moins bonnes connaissances des questions sexuelles que les personnes ayant pris part à une étude semblable en 1989. Parallèlement, les cours d’éducation sexuelle ont graduellement été abolis dans les écoles secondaires depuis 2005. L’éducation sexuelle n’est pas considérée comme faisant partie des «matières fondamentales», c’est donc chacun des professeurs des différentes matières (math, géographie...) qui doit s’en charger de manière transversale.

Le simple fait que des groupes religieux ou «masculinistes» qualifient encore aujourd’hui d’immoral le fait qu’une femme soit libre de mener à terme une grossesse ou non nous indique qu’il reste du chemin à faire dans notre société afin d’assurer à chacune la possibilité de planifier de manière autonome et éclairée une naissance.

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Extrait du numéro 18 de Cause commune

Pendant ce temps en Ontario...

Nos camarades de l'organisation anarchiste ontarienne 'Common Cause' viennent de lancer le numéro 2 de Linchpin, leur journal (on avait parlé du premier numéro ici).

La «une» de ce numéro deux porte sur la lutte de deux déserteurs américains qui demandaient l'asile au Canada. Avant les fêtes, la cour suprême avait refusé d'entendre leur appel (l'État canadien leur a refusé le statu de réfugié). En attendant, le NPD revendique la création d'un programme pour permettre à des résistantEs à la guerre en Irak de rester au Canada, comme dans le temps du Vietnam. Il faut dire qu'avec l'état de décrépitude avancé des programmes sociaux américains, notamment l'absence de système de santé public et les coûts exorbitant de l'éducation, la situation des soldats ressemble étrangement à une «conscription économique». L'ennui c'est que, pour profiter des «bénéfices» de l'armée (santé et éducation «gratuite»), il faut être prêt à se battre, ce qui prend une tout autre dimension depuis que les É.-U. sont impliqués dans une sanglante guerre d'occupation à long terme. Évidemment, les camarades demandent avec force «qu'on les laisse rester».

Également au sommaire, les camarades se penchent notamment sur la nécessaire révolte des travailleurs précaires, font une entrevue avec un «syndicat» de quêteux d'Ottawa (!), réfléchissent à la question de la police dans une perspective libertaire, et bien plus.

Pour l'instant, Linchpin ne vit que sur le web. Il s'agit d'un document pdf de huit pages que les membres et sympathisantEs de Common Cause sont invités à imprimer et diffuser autour d'eux. Toutefois, les éditeurs caressent l'idée d'avoir un vrai tirage papier dès le prochain numéro (ou le suivant), une fois qu'ils et elles se seront fait les dents. Vous pouvez télécharger le pdf ici ou consulter le sommaire html.

Common Cause

Selon nos informations, la nouvelle organisation anarcho-communiste ontarienne progresserait bien. Déjà deux «locaux» existent, à Toronto et Hamilton, et un troisième est en formation à Ottawa. Linchpin n'est que l'un des projets de publication de Common Cause, vous pouvez aussi consulter leur site web qui contient plus d'articles de même que des blogues.

MISE-À-JOUR: Le «local» d'Ottawa a l'air d'exister puisqu'ils ont publiés un encart local pour le no 2. Anarchism in Ottawa se présente comme une feuille 8,5 X 11 recto-verso. Ce premier no présente Common Cause et les groupes militantEs de l'autre «capitale nationale» (ou crapital comme ils l'écrivent). On y apprend qu'il y a à Ottawa un Infoshop (Exil), une «assemblée des anarchistes», un groupe d'étude, etc. (toute des choses qui sembleront surement très exotique (!) aux militantEs de Québec... ;-) On peut télécharger le pdf ici).

lundi 28 janvier 2008

Cause commune no 18

Le numéro 18 de Cause commune, le journal de la NEFAC au Québec, est maintenant disponible sur le web. 4000 exemplaires papier de ce journal sont distribués gratuitement par des militantEs libertaires, membres ou non de l’organisation. Cause commune se veut un tremplin pour les idées anarchistes, en appui aux mouvements de résistance contre les patrons, les proprios et leurs alliés au gouvernement. Si le journal vous plaît et que vous voulez aider à le diffuser dans votre milieu, contactez le collectif de la NEFAC le plus près de vous.

Un pdf à basse résolution --format tabloïd-- est disponible.

Au sommaire du no 18 (format HTML)

dimanche 27 janvier 2008

Un cul de sac

Selon la CSN, plus de 1500 personnes ont manifesté dimanche à Donnacona en solidarité avec les 250 syndiqué-es pour sauver l’usine Abitibi-Bowater, menacée de fermeture permanente. Si rien ne bouge, le 30 janvier les activités vont s'arrêter à l'usine et personne ne sait pour combien de temps.

«Une fermeture, jamais!», a lancé le président du Syndicat national des travailleurs des pâtes et papier de Donnacona (CSN), Robert Drolet, alors qu’il prenait la parole à l’issue de la marche. Slogans repris par plusieurs autres intervenant-es. Le syndicat, malgré l'appui «solidaire et total» de la CSN (c'est Claudette qui le dit), n'a toutefois rien de mieux à proposer que la création d'une vaste coalition mené par le maire de la place.

* * *

À Kitchener, en Ontario, les syndiqués TCA de l'usine de d'outillage Ledco Limited ont mit fin à l'occupation de leur lieu de travail après avoir reçu une deuxième injonction. L'employeur vient d'annoncer une fermeture sauvage et s'est placé sous la protection de la loi. Les 70 occupant-es voulaient au moins s'assurer de recevoir leurs indemnités de départ. En effet, en vertu des lois actuelles sur la faillite, les travailleurs ne reçoivent leurs indemnités de départ que si la société dispose de suffisamment de liquidités après avoir payé tous ses créanciers. Pour l'instant, les TCA veulent maintenir la pression sur les clients de Ledco tel GM.

* * *

À Montréal, les syndiqué-es FTQ appellent au boycott des marques Du Maurier, Players et Peter Jackson. En effet, Imperial Tobacco a décidé de fermer sa dernière usine au Canada et a transféré la production au Mexique.

* * *

Un même problème, trois «solutions», allant du plus mou au plus radical. Et pourtant... Aucune stratégie gagnante qui pointe à l'horizon. La mondialisation néolibérale, un phénomène à la fois politique et économique, désarme, déstabilise et insécurise profondément les communautés ouvrières et leurs organisations de défense. Le moins que l'on puisse dire c'est que le syndicalisme est en crise. Pendant combien de temps encore serons-nous les dindons de la farce?

Pendant ce temps à Sherbrooke...

Au cas où nous aurions des lectrices et des lecteurs de Sherbrooke...

Activité publique à Sherbrooke:
Brisons les chaînes de l'oppression!


Une présentation sur l’anarchisme, le communisme libertaire, la lutte des classes,le féminisme, l’anti-racisme et l’anti-impérialisme donnée par des militantEs de la Fédération des Communistes Libertaires du Nord-Est (NEFAC).

Quand? Jeudi 7 février 2008, 19H00
Où? Au Tremplin, 97 rue Wellington Sud

Évidemment gratuit!

Organisée dans la perspective de former un collectif de la NEFAC à Sherbrooke.

infos: sherbrooke[arobas]nefac.net

vendredi 25 janvier 2008

Néo-nazi arrêté à Limoilou




Le fondateur de la Fédération des québécois de souche, un mouvement suppémaciste blanc et néo-nazi, a été arrêté chez lui avant hier, dans le quartier Limoilou de la ville de Québec. Maxime Fiset, un agent de sécurité et colosse de 19 ans, s'était fait remarquer au cours des derniers mois avec ce site internet contenant un forum de discussion où des propos haineux envers les minorités visibles et les gays étaient tenus quotidiennement par la cinquantaine de membres du site. Il s'était aussi fait remarquer par son engouement pour le mouvement national-socialiste (nazi), pour ses amitiés avec des skinheads néo-nazis (boneheads), look qu'il avait lui-même adopté depuis quelques mois. Maxime Fiset avait rencontré, il y a quelques semaines, l'un des leaders de la Milice Patriotique du Québec, un mouvement paramilitaire dont Fiset disait du bien après cette rencontre tenue dans un restaurant de Limoilou, parce que la personne qu'il avait rencontré était sympathique aux idées de Fiset de de la FQS. Sur le site de la FQS, il était question de grands projets qui seraient mis en oeuvre prochainement et d'une offensive à venir. Avouant sans gêne être le camarade de 4 néo-nazis ayant tabassé un gay le 1er juillet dernier au Carré d'Youville, Fiset a été visité par l'unité de lutte contre le terrorisme de la Sûreté du Québec dans le cadre d'une enquête pour propagande haineuse. Du matériel informatique a été saisi et l'enquête se poursuit, et il n'a été pour le moment accusé que de possession d'arme prohibée. Il lui est maintenant interdit d'utiliser un ordinateur ou internet, mais dès le lendemain de son arrestation, il faisait passer un message via une amie sur son site internet, message dans lequel il dit à ses ''camarades'' de ne pas cesser le combat pour la race blanche.

Depuis 2 ou 3 ans, les groupuscules néo-nazis semblent regagner en vigueur dans la ville de Québec et, dans ce contexte, la lutte antifasciste directe et quotidienne, menée par des militants antiracistes et par monsieur et madame tout le monde, est nécessaire. Il y a eu trop d'agressions et d'intimidation, et il faut savoir appliquer des tactiques d'autodéfense offensive qui seront en mesure de désorganiser les quelques dizaines de néo-nazis de la ville encore plus qu'ils ne le sont pour l'instant.

Nous vous tiendrons au courant des suites du dossier de Maxime Fiset de de la FQS. Notons finalement que c'est le journal Média Matin Québec qui fut le seul média à parler de l'affaire. Vous pouvez trouver l'article en question ici.

jeudi 24 janvier 2008

935 mensonges en 2 ans au sujet de l'Irak


Divers articles parus aujourd'hui nous apprennent, sans grande suprise, que le président Bush et ses collaborateurs on fait 935 déclarations mensongères au sujet de l'Irak entre 2001 et 2003 afin de justifier l'invasion du pays.

Ça bouge à l'Université Laval

Ça bouge à l'Université Laval et cette fois ce n'est pas le mouvement étudiant qui est à l'avant-scène. L'Impact Campus, l'hebdo étudiant, nous apprend que le Syndicat des employés de l'Université Laval (le SEUL*), ça c'est les employés de soutien, a fait salle comble récemment. En effet, 804 membres se sont pointés à la dernière assemblée d'information du syndicat dans le Grand salon. C'est la moitié des syndiqués ça!

Selon le journal étudiant, Luc Brouillette, le président du syndicat, est irrité de l'annulation de plusieurs rencontres de négociation en décembre et du peu de pouvoir des représentants patronaux qu'il qualifie de «fantoches». Une menace de grève plane actuellement sur le campus fidéen. (Source.)

(*) drôle d'accronyme pour un syndicat...

Aujourd’hui comme hier : nous rejetons votre guerre !

C’est en grande pompe que la ville de Québec célèbre en 2008 le 400e anniversaire de sa fondation. Nous avons déjà souligné le faste avec lequel les élites entendent souligner cet événement (1). Mais au delà des millions dilapidés aux quatre vents, la fête prend une dimension politique. Dans leur programmation, les organisateurs passent évidemment sous silence les 400 ans de colonialisme et de génocide des peuples autochtones qui occupaient ce territoire bien avant Samuel de Champlain. Et bien entendu, on oublie également de parler des luttes menées par la population de Québec contre la domination et l’exploitation.

L’une d’entre elle mérite pourtant d’être soulignée : la résistance contre la conscription de 1918. Le Canada est alors plongé dans la Première Guerre mondiale. Le gouvernement a envoyé plus de 400 000 hommes sur les champs de batailles. Parmi eux, 60 000 meurent au combat. La propagande militaire canadienne frappe toutefois un mur, notamment au Québec. Les francophones, dans leur immense majorité, rejettent l’enrôlement obligatoire et refusent de défendre l’empire britannique au prix de milliers de vies humaines. Les socialistes proposent la conscription des richesses et font campagne en faveur de la grève générale pour y arriver. À l’occasion, la colère populaire s’exprime avec violence, créant un climat de tension particulièrement intense aux quatre coins de la province. À Montréal, en 1917, des « dynamiteros » font sauter la résidence d’un farouche partisan de la conscription tandis qu’à travers le Québec, des manifestations anti-impérialistes ponctuent les dernières années de la guerre.

Du 28 mars au 1er avril 1918, la ville de Québec est secouée par de violentes émeutes qui opposent pendant cinq jours et quatre nuits plusieurs milliers d’anti-conscriptionistes aux autorités civiles, religieuses et militaires. Suite à l’arrestation par la police fédérale d’un jeune homme dispensé du service militaire, Joseph Mercier, des manifestants attaquent le poste de police de la Place Jacques-Cartier, dans le quartier Saint-Roch. Le lendemain, les émeutiers investissent les bureaux d’inscription militaire situés à la Place Montcalm (aujourd’hui le Carré d’Youville) et brûlent les documents qu’ils trouvent sur place. Deux journaux appuyant la conscription (l’Événement et le Chronicle) sont également attaqués par la foule venue en masse des quartiers ouvriers de la Basse-Ville. Malgré l’arrivée de centaines de soldats venus de l’Ontario, la population n’en démord pas, préférant s’armer pour faire face aux charges des militaires.

C’est le plus haut gradé francophone de l’armée canadienne, le Major-Général François-Louis Lessard, qui prend maintenant le contrôle des opérations pour rétablir « la loi et l’ordre ». Comme l’explique l’historien Jean Provencher, « cet officier s’y connaît en matière de rébellion ou de soulèvement. On le retrouve à Québec, en juin 1878, alors que l’armée intervient contre des ouvriers grévistes qui “s’adonnent à la violence et au pillage” (2). Il sera décoré pour sa participation à l’intervention armée contre les Métis en 1885. Il dirigera le régiment des Royal Canadian Dragoons en Afrique du Sud, en 1900 et 1901. Il se retrouve maintenant à Québec dans des circonstances quelque peu identiques » (3).

C’est à grand renfort de mitrailleuses que se réglera le soulèvement populaire. Au coin des rues Saint-Vallier et Saint-Joseph, l’armée tire sur la foule, faisant quatre morts. On compte parmi eux trois ouvriers (Honoré Bergeron, Alexandre Bussières, Georges Demeule, qui est âgé d’à peine 15 ans) et un étudiant (Joseph-Édouard Tremblay). Tous habitent le quartier Saint-Sauveur. Au total, plus de 75 personnes sont blessées pendant les troubles, dont plusieurs par balles. Leur nombre exact reste incertain, la plupart évitant de se rendre à l’hôpital où les militaires procèdent à des arrestations. Plus de 2000 soldats prirent part à la contre-insurrection, faisant de cette opération militaire l’une des trois plus importantes sur le sol québécois avec les événements d’octobre 1970 et la crise d’Oka en 1990.

Aujourd’hui, 90 ans plus tard, le Canada est de nouveau en guerre aux côtés des puissances occidentales. Les motifs ne sont guère différents : une fois de plus, il s’agit d’une guerre impérialiste menée au nom de la démocratie et de la liberté. Mais, hier comme aujourd’hui, les peuples ne sont pas dupes. Malgré la propagande incessante, une majorité de la population québécoise s’oppose à la guerre. Si la conscription n’est pas à l’ordre du jour, l’armée redouble d’effort pour recruter les jeunes des milieux populaires et les envoyer mourir au front. Malgré les protestations, le gouvernement conservateur fait la sourde oreille et continue d’aller de l’avant. C’est en notre nom, et avec notre argent, que le Canada fait la guerre.

Cette opposition populaire doit pouvoir s’exprimer! C’est pourquoi nous marcherons le 28 mars prochain pour commémorer le 90e anniversaire des émeutes contre la conscription et pour manifester notre opposition à la guerre en Afghanistan.

Manifestation anti-militariste, Vendredi le 28 mars
Rassemblement à 17h, devant la bibliothèque Gabrielle-Roy (350, rue Saint-Joseph Est) à Québec.

Nous vous invitons à soutenir cette manifestation en nous contactant par la poste ou par couriel et en manifestant avec nous le 28 mars prochain. Un appel officiel sera envoyé sous peu.

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Notes :
(1) À ce sujet, voir : « Du pain et des jeux », dans Cause Commune, numéro 11, automne 2006, p. 1.
(2) L’armée tue pendant cette grève un ouvrier d’origine française, Édouard Beaudoire, que des rapports militaires présentent comme un socialiste qui a participé à la Commune de Paris.
(3) Jean Provencher (1971), Québec sous la loi des mesures de guerre 1918, Montréal, Éditions du Boréal Express, p. 82.

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Ce texte sera publié en une du prochain Cause commune (qui devrait arriver en ville d'ici lundi)

mercredi 23 janvier 2008

Question de perspective

Je suis plus riche depuis le début du mois. Ma paie a en effet été majoré de 12,59$ par quinzaine. Ça me fait une augmentation de 1,5%. Cette augmentation, je ne la doit pas à mes patrons mais à Monique Jérôme-Forget. En effet, 12,59$ par deux semaines c'est ce que ça donne les baisse d'impôt rendu à mon humble personne. Je ne sais pas trop si je devrais en rire ou en pleurer.

L'État claque un milliard en baisse d'impôt alors qu'il peine à assumer ses responsabilités en santé et en éducation. Les infrastructures tombent en ruine, on ne remplace pas les fonctionnaires qui partent à la retraite, les universités sont toutes au bord de la faillite, on augmente les frais de scolarité, on presse le citron à toutes les sociétés d'État mais on trouve le moyen de baisser les impôts. J'en reviens juste pas.

J'ai appelé au groupe de défense de droit des personnes assistées sociales de la ville pour savoir à combien exactement se chiffrait l'indexation de cette année. Vérification faite, on a donné 3,25$ de plus par mois aux plus pauvres d'entre les pauvres. Il me semble que mon 12,59$ a un arrière-goût amer. Tout est question de perspective j'imagine.

Monique, tu devrais avoir honte...

mardi 22 janvier 2008

En prolongation



C'est sans surprise que le rapport Manley recommande de prolonger la mission en Afghanistan. Malgré l'opinion publique et le bon sens. Sans commentaire. Que faire? Continuer de manifester notre opposition. 28 mars. Retenez cette date. Une occasion parmi d'autre de promener notre anti-militarisme dans les rues de la capitale.

(image repiquée au blogue du groupe nada).

lundi 21 janvier 2008

Documentaire: Québec, lieu de passage

Il est extrêmement rare, au Québec en tout cas, qu'on tende le micro aux minorités. La diffusion du documentaire Québec, lieu de passage à Télé-Québec ce soir est donc en soit un évènement. Ce film se penche en effet sur les difficultés d'intégration des immigrantEs et des personnes de couleurs à la Ville de Québec. Et, pour une fois, on donne surtout la parole aux principaux intéressés. Personnellement, je ne me souviens que de Droit de parole qui a fait ça dans le passé. On retrouve dans le film Webster et sa famille, d'autres membres des Limoilou Starz, Mirlande de la Coalition contre la discrimination, des bénévoles de la Ruche Vanier, des professionnels, des officiels, etc.. Comme on s'en doute, tout est loin d'être rose mais il faut absolument entendre ce que les gens ont à dire et se sortir la tête du sable. C'est de l'avenir dont il est question. Peu de chiffres et de grands discours dans ce film mais beaucoup d'humanité. À voir.

Ça repasse à Télé-Québec le mardi 22 janvier 2008, à 14 h 04.

Sinon, contactez l'équipe de Vidéo-Femmes pour savoir comment en obtenir une copies (Fiche du film).

Québec, lieu de passage
51 minutes, documentaire, 2007, Québec
réalisation: Martine Asselin and Éric Martin
production: Vidéo Femmes avec la collaboration de Télé-Québec

De la saine gestion des fonds publics


Il y a quelques années, un nouveau slogan a fait son apparition dans les manifestations: «plus, plus, plus qu'y coupent pis plus qu'y mettent de flics». Je n'ai jamais vraiment douté de la véracité profonde de ce slogan, même si ce n'est pas toujours visible à l'oeil nu. Il n'en demeure pas moins que si les fonds se font rare pour les programmes sociaux, il ne manque jamais d'argent pour la répression. Montebello en est un bel exemple. Coût de la sécurité lors de ce mini-sommet de 22 heures? 28 millions de dollars, dont 13,4 millions pour la GRC et 7 millions pour la Sûreté du Québec, qui à elle seule a déployé 1328 agents. 1328, c'est plus que la population de Montebello et grosso modo le nombre de manifestants sur place nous rappelle Claude Généreux, le trésorier du SCFP, dans Le Soleil de ce matin. Et dire que la droite se vante de sa gestion prudente des fonds publics...(Source.)

samedi 19 janvier 2008

Les classiques de la subversion : « Bourgeois et bras nus »

Daniel Guérin avait en 1946 publié son monumental ouvrage sur la Révolution française Les Luttes de classe sous la Ire République. Bourgeois et bras nus, paru en 1973, en est la version synthétique. Il fait partie de l’historiographie officielle de la république. La Révolution française est vue comme la fondation de la nation française. La révolution française est réellement l’expression de la lutte des classes au sein de la société française. Elle fut le triomphe de la bourgeoisie alliée aux masses populaires contre l’aristocratie. Fait bien moins connu, la révolution française est aussi une des premières expressions de la lutte des classes entre prolétariat et bourgeoisie. La Commune insurrectionnelle de Paris porte des revendications clairement socialistes. Son mode de fonctionnement préfigure les pratiques autogestionnaires ainsi que les soviets (les conseils populaires pratiquant la démocratie directe et non la sinistre parodie de ceux-ci pratiquée par l’URSS stalinienne) Daniel Guérin s’attache à éclairer les péripéties de cette lutte des classes qu’il appelle guerre sociale.

« La guerre sociale »

Bourgeois et bras nus retrace les circonstances de cette lutte des classes. Avec les journées insurrectionnelles du 31 mai et du 2 juin, la fraction dure du club des Jacobins, que l’on appelle la Montagne arrive au pouvoir. Ils sont des membres de la moyenne et petite bourgeoisie et ils se caractérisent par leur radicalité idéologique. Néanmoins leurs idéaux économiques n’ont pas le caractère socialiste avant la lettre des revendications du mouvement populaire.

Seulement la Montagne s’est appuyée sur le peuple de Paris, les Sans-culotte, les militantes et les militants des sections pour arriver au pouvoir. Le mouvement populaire a, pour sa part, des revendications plus radicales. Elles portent sur le plan économique. La principale revendication est l’application du maximum, mesure qui limite les prix des biens de première nécessité afin de permettre à tout le monde de manger au mépris des lois du marché qui, déjà à l’époque, ne fonctionnait pas. Leur projet est plus large. Les Bras nus se réclament de la souveraineté populaire, de la démocratie directe, bref, de l’autogestion avant la lettre. Leurs intérêts de classe vont porter les Bras nus à s’opposer au gouvernement révolutionnaire jacobin. Des groupes politiques vont mener une agitation au sein des assemblées des sections qui sont le cœur du mouvement populaire.

Le groupe qui intéresse le plus Guérin est celui des Enragés. Ils disent que l’égalité formelle ne vaut rien s’il n’y a pas de réelle égalité sociale, celle-ci ne pouvant s’obtenir que par une redistribution des richesses, forcée si nécessaire. Par exemple, Jacques Roux déclare à la Convention : « la liberté n’est qu’un vain fantôme quand le riche, par le monopole, exerce le droit de vie ou de mort sur son semblable. »

Pour finir, Guérin explique comment le mouvement populaire fut muselé puis écrasé en Thermidor. Cet ouvrage suscita de très vives polémiques, notamment sur la question des Sans-Culottes ou Bras nus en tant que classe sociale au sens marxiste du terme. Il faut lire ce livre non comme un ouvrage historique précis mais comme un essai engagé qui donne un sens nouveau à la révolution française.

En effet l’interprétation de celle-ci est déformée par l’historiographie officielle. Bourgeois et Bras nus met en lumière les luttes populaires qui s’y sont déroulées. Le livre permet aussi de voir que cette révolution a été l’acte de naissance des idéaux révolutionnaires, de la redistribution des richesses à la lutte des classes, en passant par la démocratie directe. On y voit aussi que la distance entre l’idéologie des Sans culotte et les thèses du communisme libertaire n’est pas si grande que ça.

Texte de Matthijs, publié dans le no de novembre 2007 d'Alternative libertaire.

Daniel Guérin. Bourgeois et bras nus, Les nuits rouges, 1967 (réédition 1998), 238 pages.

vendredi 18 janvier 2008

Persepolis



Yo, c'est aujourd'hui que débute la projection de Persepolis au Clap, à Québec. D'après les commentaires glanés à droite et à gauche, c'est un film à voir absolument.

«C'est l'histoire de son enfance en Iran, au moment de la chute du Shah et de l'arrivée au pouvoir des islamistes. Malgré le sérieux du sujet et le côté dramatique de ces événements, c'est drôle et incisif. C'est aussi sans concession. Une très bonne façon de se replonger dans cet épisode d'histoire souvent mal connu (en tout cas, moi, je le connaissais mal...).» - Le blogue des communistes libertaires de Seine-Saint-Denis

«Dans Persepolis, Marjane, en nous racontant sa vie, nous raconte en même temps tout un pan de l’histoire de l’Iran. Avec elle. on entre dans la vie d’une famille iranienne au passé de résistants, pour la justice sociale et la laïcité de l’État. On traitera de la sombre période du Shah d’Iran, de la répression et de la résistance populaire, de la guerre Iran-Irak, puis de l’espoir déchu d’une démocratie nouvelle rapidement islamisée… À un moment où l’on parle plus que jamais d’envahir l’Iran, ce film tombe à point. Comprendre le passé nous permet de mieux saisir le présent et d’appréhender le futur. » - Santiago (sur Parole citoyenne)

mercredi 16 janvier 2008

Couillard favorise les intérêts de l'élite économique

Les journaux nous apprennent ce matin que le ministre libéral Philippe Couillard priorise le projet de train rapide (dans le corridor Québec-Windsor) versus le projet de tramway urbain du Réseau de transport de la capitale (ici et ici). Ce faisant, le ministre priorise les intérêts de l'élite économique versus les intérêts populaires.

En effet, Couillard est clair: «J’ai eu l’occasion d’en discuter avec nos collègues de la communauté économique de Québec, et il est clair que le projet prioritaire est celui du train à haute vitesse dans le corridor Québec-Windsor», a-t-il déclaré au scribe du Soleil. Dans Média Matin, on apprend que «Couillard a rencontré récemment presque tous les leaders économiques locaux, y compris le maire Régis Labeaume». Selon le journal, «tous lui ont dit la même chose: un train avant un tramway. Assurer un lien rapide entre Québec, Montréal et Toronto serait plus favorable au développement économique», lui a-t-on fait valoir.

(C'est curieux dans la mesure ou, officiellement, le tramway est le projet prioritaire de la chambre de commerce. Mais bon...)

Alors voilà, les besoins des gens d'affaires fortunés qui pourront se payer le train rapide (et ainsi économiser du temps par rapport à un trajet en voiture) passent avant les besoins des petites gens de Québec qui utilisent un transport en commun de plus en plus saturé sur les grands axes. Les étudiantEs, les fonctionnaires, les petitEs salariéEs et les aînés n'ont qu'à continuer de voyager debout et le transport en commun continuera de stagner.

C'était quoi déjà le slogan? Ah, oui, c'est ça: «Parti libéral, parti patronal...»

mardi 15 janvier 2008

Les dommages collatéraux d'une agitation médiatique

L'Actualité fait sa «une» en ce moment avec un grand sondage Crop sur les valeurs des québécois. En gros, sans être alarmant, c'est pas rassurant. En tête de liste des valeurs les plus importantes que les gens veulent transmettre à leurs enfants: la famille (55%), l'estime de soi (45%), l'éducation (32%), l'ouverture aux autres et le respect des différences (32%) et la foi religieuse ou la spiritualité (21%). Bonjour l'individualisme!

J'avoue que j'ai avalé de travers quand j'ai vu la progression fulgurante de l'intolérance et du nationalisme identitaire depuis quelques années. L'Actualité nous apprend en effet 31% des québécois affirment aujourd'hui que les immigrants doivent mettre de côté leur culture pour adopter celle du Québec. C'est plus du double qu'en 2005 (14%)! Voilà un dommage collatéral d'une certaine agitation médiatique.

Ça fait (au moins) un an que les médias nous écœurent avec le «débat» sur les accommodements raisonnables. En fin d'année, Influence communication rapportait que, l'an dernier, «83 % de toute la couverture médiatique accordée à l'une ou l'autre des nombreuses communautés ethniques du Québec a été réalisée en marge de sujets controversés ou dans le cadre de situations conflictuelles» (voir ici). Forcément, un moment donné, ça a un impact.

Heureusement, tout n'est pas sombre dans ce sondage. Par exemple, le sondeur demandait «quelles sont les trois valeurs, parmi les suivantes, que le Québec devrait privilégier pour l'avenir». Il est intéressant de constater que 26% des gens choisissaient «La justice sociale et la répartition de la richesse» versus seulement 11% qui choisissaient «L'importance du travail et de la création de la richesse». Un velours pour la gauche quand l'on sait le matraquage qui a été fait autour des idées des «lucides». N'empêche, on a du pain sur la planche.

dimanche 13 janvier 2008

L’anarchie de «A» à «Z» - «Q» comme Quartier

Le quartier est à la fois un lieu de vie, un terrain de lutte et l’un des points de départ de toute transformation fondamentale de la société. Le quartier est au cœur du projet politique libertaire.

Au Moyen-Âge, on disait que «l’air de la ville rend libre». C’est encore vrai dans une certaine mesure: l’ordre moral y est moins prononcé et le champ des possibles, entre autres, y est plus large qu’ailleurs. Plus la ville est grande, plus on est libre… et anonyme. C’est l’envers de la médaille, le côté obscur de la société de masse et du «vivre et laisser vivre». Heureusement, nous ne vivons ni dans le transport en commun, ni dans le trafic! En grattant à peine, pour peu qu’on s’y investisse, on trouve dans la ville plusieurs communautés à échelle humaine: les quartiers. Le quartier est une partie de la ville ayant sa physionomie propre et une certaine unité sociale. Chaque quartier a son histoire, son cachet et, pour certains quartiers ouvriers, son fumet (dépendant de l'usine du coin!).

Les vieux quartiers populaires sont devenus des terrains de lutte de classe importants. Sous couvert de revitalisation et pour répondre aux besoins de la dictature automobile, on démolit, construit et défigure à tour de bras. Face aux bourgeois, grands ou petits, et à l’État, des gens se lèvent et la résistance s’organise en comités de citoyenNEs et groupes populaires. Droit au logement, services communautaires, aménagement urbain, revendications locales, les habitantEs des quartiers veulent avoir leur mot à dire et maîtriser leur environnement immédiat.

De communautés fortuites, certains quartiers se sont tranformés avec le temps en communautés solidaires. Pour qui ne s’enfarge pas dans les fleurs du tapis, c’est l’une des rares expressions contemporaines d’antagonisme et, n’ayons pas peur des mots, de conscience de classe (au moins potentiellement). Voilà qui est précieux pour ceux et celles qui veulent changer le monde. Pas surprenant que les communistes libertaires soient investis avec autant d’énergie dans les quartiers que sur les lieux de travail.

Communisme libertaire

En parlant de notre projet de société, nous avons souvent braqués les projecteurs sur son versant économique («De chacun selon ses moyens, bla bla bla…»). Dans «communisme» il y a, bien sur, «commun» mais aussi «commune». Les révolutionnaires que nous sommes pensent automatiquement à «La Commune», celle de Paris (rien à voir avec les hippies), et oublient qu’en Europe, là où a d’abord été pensé le communisme libertaire, «commune» désigne aussi, plus prosaïquement, une simple municipalité.

Le communisme libertaire part des quartiers et des entreprises autogérées, dont les assemblées de masse sont souveraines. La démocratie directe telle que la conçoivent les anarchistes est un fédéralisme à deux pattes, l’une économique, l’autre géographique. La commune se trouve à être la fédération des assemblées, le conseil municipal la rencontre des déléguéEs de quartiers et d’entreprises, choisis, mandatés et révocables par la base. Les communes existent pour planifier l’économie, doter les villes de services publics et mener à bien les projets locaux. Elles s’unissent en fédérations pour ce qui les dépasse et ce dont elles ne peuvent s’occuper seules. Les assemblées d’entreprises font de même pour former des fédérations industrielles, les deux secteurs étant unis à tous les niveaux, du local au global, en structures confédérales.

Le communisme libertaire, c’est la mise en commun de la richesse, et des moyens de la produire, mais aussi le triomphe de la fédération des communes libres sur l’État-nation.

(Texte à paraitre dans le journal Cause commune)

samedi 12 janvier 2008

Détournement réussi des Anarchistes contre le Mur

(Un lecteur nous a fait parvenir la note suivante. N'hésitez pas à faire de même si vous voyez passer des trucs intéressants...)

Très porté sur les punitions collectives (formellement interdites par les Conventions de Genève qui régissent la conduite des puissances occupantes en temps de guerre), l’État d’Israël coupe périodiquement l’approvisionnement d’électricité dans la Bande de Gaza (après avoir bombardé la seule centrale électrique à Gaza en 2006). Outre des protestations habituelles venant des associations israéliennes des droits humains et du mouvement anticolonialiste, une composante de a gauche extraparlementaire a pris une initiative originale dans le but de frapper les esprits. Début décembre, de nombreux habitants des trois principales villes du pays (Tel-Aviv, Jérusalem et Haïfa) ont eu la surprise de recevoir dans leur boîte aux lettres un avis de la Compagnie Générale d’Électricité (l’EDF israélienne). Cette notice, distribuée à quelque 10 000 exemplaires, les informait qu’ils allaient bientôt subir des coupures de courant. L’avis précisait que « l’électricité reviendrait lorsque Israël cesserait d’en priver les habitants de Gaza ». Ornées du sigle de la Compagnie Générale d’Électricité, ces affichettes étaient signées d’un mystérieux « Front de Libération de Gaza ». En fait, les auteurs de ce canular n’étaient pas des agents de la Compagnie Générale, ni des combattants d’un mouvement armé inconnu, mais des militants israéliens des Anarchistes Contre le Mur. Une des initiatrices, Adar Graëvsky, explique : « Les mesures prises par Israël contre les habitants de Gaza, sans distinction, nous semblent cruelles autant qu’inutiles. Ce ne sont que des actes de vengeance. » Avant d’ajouter : « De même que les habitants de Tel-Aviv sous pression ne peuvent pas arrêter les actes de leur gouvernement, de même les habitants de Gaza sous pression ne ourront pas faire cesser les tirs de Kassam. » Même si « le courant ne passe pas » dans l’opinion israélienne, les anarchistes à l’origine de cette protestation inédite espèrent que le message, lui, passe. Selon Hagaï Mattar,
objecteur de conscience et militant du « Forum contre les crimes de guerre », le but de cette action « n’était pas d’effrayer la population, mais de faire réfléchir les citoyens sur ce que fait leur gouvernement en leur nom. » L’action des Anarchistes Contre le Mur a-t-elle entraîné des recours devant les tribunaux ? Contre les officiers israéliens pour crimes de guerre ? Non, contre les militants anarchistes pour utilisation illicite du logo de la Compagnie Générale d’Électricité. L’entreprise réclame des dommages et intérêts. À chacun d’exprimer son indignation, qu’il s’agisse des infractions à l’encontre du droit international ou des infractions à l’encontre du droit commercial israélien… (communiqué par l’UJPF)

À signaler: Projection des films de Guy Debord

ANTITUBE présente

RÉTROSPECTIVE COMPLÈTE DES FILMS DE GUY DEBORD

ANTI-CINÉASTE ET SITUATIONNISTE

Les mercredis 16, 23 et 30 janvier à 20 h

De 1951 à 1994, Guy Debord a sévi publiquement. Ce fondateur de l’Internationale Situationniste, un mouvement révolutionnaire qui se plaçait à la rencontre de l’art et de la politique, est l’un des esprits les plus influents de la fin du 20e siècle et du 21e siècle naissant. Il a écrit des livres, des articles vitrioliques. Il a fait des films.

Un livre, publié en 1967, le fera connaître universellement : La société du spectacle. Celui qui a su adapter les textes de Marx pour les confronter à la société de consommation, à l’utopie de la société des loisirs et à la communication de masse, a posé les bases d’une des critiques les plus incisives de notre monde.

Plusieurs voient en Guy Debord un précurseur de nombreuses protestations du progrès tel qu’il est envisagé par le marché des pensées : du mouvement punk à l’utopie de création annuelle de Burning Man, de Mai 68 aux logiciels d’échange de fichiers pirates.

Pour le premier événement de 2008, nous vous invitons à découvrir ou à redécouvrir les œuvres cinémato- graphiques de Guy Debord, philosophe, critique social, militant et cinéaste : une partie du travail considérable de celui qui n’a jamais travaillé.



PROGRAMMATION

16 JANVIER
  • Hurlements en faveur de Sade / 1952, 80 min
  • Sur le passage de quelques personnes à travers une assez courte unité de temps / 1959, 20 min
  • Critique de la séparation / 1961, 20 min


23 JANVIER
  • La Société du spectacle / 1973, 88 min
  • Réfutation de tous les jugements, tant élogieux qu'hostiles, qui ont été jusqu'ici portés sur le film « La Société du spectacle » / 1974, 21 min


30 JANVIER
  • In girum imus nocte et consumimur igni / 1978, 105 min
  • Guy Debord, son art et son temps / coréalisé par Brigitte Cornand / 1994, 60 min





RÉSERVATION : (418) 643-2158
INFORMATION : (418) 524-2113
www.antitube.org

Auditorium 1 du Musée de la civilisation
(85, rue Dalhousie, Québec)

Admission générale
5 $ / 2 $ membres d’Antitube et étudiant-e-s avec carte


N.B.: Cette annonce n'est pas nécessairement une recommandation du collectif. En effet, le «cinéma» de Guy Debord n'est vraiment pas la tasse de thé de tout le monde... Certains vont adorer, d'autres détester pour mourir.

vendredi 11 janvier 2008

Québec blanche comme neige?

Québec, la cause est entendue, est depuis toujours une ville exclusivement blanche, française et catholique. Vraiment? Rien n'est moins sur. Et si Québec n'avait jamais été blanche comme neige?

Il semble que le premier noir a avoir mis les pieds à Québec l'a fait en... 1604! Samuel de Champlain était en effet accompagné d'un interprète noir, Mathieu Da Costa. Selon ce que l'on sait, Da Costa parlait probablement le français, le hollandais, le portugais ainsi que le «pidgin basque». Selon les historiens, ce dialecte était sans doute la langue de commerce la plus utilisée à l'époque avec les peuples autochtones des rives du Saint-Laurent. Cette «langue» aurait été développée par les pêcheurs basques qui, ne l'oublions pas, ont précédés Champlain de beaucoup sur les rives du Saint-Laurent.

Un noir qui sert d'interprète entre les blancs et les amérindiens ça vous semble gros? Il faut savoir qu'au moment de la fondation de Québec, ça faisait déjà un siècle que les navigateurs européens se servaient d'interprètes noirs pour le commerce. À l'époque, plutôt que d'apprendre la langue de «l'autre», on créait des «langues» ultra simplifiée, qu'on appelle «pidgin», pour communiquer. Comme les premiers «pidgins» ont été développés en Afrique, et comme les européens ne voulaient pas s'abaisser à apprendre des langues non-européennes, ce sont des noirs qui ont développés le métier...

Da Costa était un homme libre, engagé à contrat, assez respecté pour que français et hollandais se soient battus en cours pendant dix ans pour savoir pour qui au juste il devrait travailler (c'est d'ailleurs grâce à ces papier légaux que les historiens on pu le retracer). On pense qu'il serait mort à Port-Royal en 1608. Ces successeurs ont été toutefois moins chanceux et chanceuses et sont arrivés ici comme esclaves. Le premier esclave répertorié au Canada s'appelait Olivier Lejeune, il appartenait à un jésuite. Il y aura quelques 10 000 esclaves au Canada, jusqu'à l'abolition de cet immonde «commerce» en 1833, en même temps que dans le reste de l'empire britannique.

* * *

L'inspiration de ce texte m'est venue d'un chanson de Webster (QC Histoy X), comme quoi le rap a du bon. En fouillant Internet, j'ai vu que Webster avait commis un texte sur la place des noirs dans l'histoire du Québec (par ici).

Pour en savoir plus sur le «pidgin basque» vous pouvez lire ça. En ce qui concerne Da Costa, le texte le plus complet que j'ai trouvé est ici (c'est un pdf).

jeudi 10 janvier 2008

Hausse de loyer : un petit guide pratique

Nous sommes actuellement en pleine période de renouvèlement des baux. Pour l'immense majorité des locataires, ceux et celles dont le bail se termine le 30 juin, ça se passe entre le premier janvier et le 31 mars. Aussi bien dire maintenant!

Qui dit renouvèlement de bail dit, en général, augmentation de loyer. Et ça peut être assez salé merci. Dans l'état actuel des choses, sans réel contrôle des loyers, c'est à chaque locataire de voir à ses affaires et de freiner les augmentations abusives. Voici comment s'y prendre.

Renouvèlement de bail

Le propriétaire a le droit d'augmenter le loyer une fois par année, lors du renouvèlement du bail. Il y a des délais légaux qui s'appliquent. Dans le cas d'un bail d'un an, l'avis de renouvèlement doit être envoyé de 3 à 6 mois avant la fin du bail. Les locataires ont un mois après la réception de l'avis pour répondre. Légalement, qui ne dit mot consent, c'est-à-dire que si vous ne répondez pas, le bail est automatiquement renouvelé aux conditions fixées dans l'avis. Donc, si vous voulez déménager en juillet, c'est le temps de le dire (mais faites attention, les logements libres ne courent pas les rues)!

Comment calculer la hausse?

À chaque année, à la fin janvier, la Régie du logement publie des indices d'augmentation de loyer. Ce sont des pourcentages moyens d'augmentation selon le type de chauffage. Si l'augmentation que demande votre proprio est plus élevée, ça vaut la peine de creuser un peu plus. Le propriétaire doit pouvoir la justifier et fournir des preuves (sinon, comment juger?). Trois facteurs principaux peuvent expliquer une hausse plus élevée que la moyenne: les taxes municipales, les taxes scolaires et les rénovations majeures. Pour vous faciliter la vie, la Régie du logement fournit une grille de calcul (mais celle de 2008 n'était pas en ligne au moment d'écrire ces lignes).

Comment refuser l'augmentation?

Vous pouvez aussi conserver votre logement ET refuser l'augmentation de loyer. C'est une procédure assez simple: il suffit d'écrire une lettre au propriétaire lui disant que vous voulez renouveler votre bail mais que vous refusez l'augmentation proposée. Il faut le faire par écrit, dans un délais maximum de trente jours après réception de l'avis du proprio, et en garder une preuve formelle (soit vous faites signer un accusé réception à votre proprio, soit vous envoyez votre lettre par courrier recommandé).

Qu'est-ce qui se passe après un refus?

Après votre refus, le propriétaire a lui aussi un mois pour réagir. Soit il ou elle s'assoit avec vous pour négocier, soit il introduit "une cause en fixation de loyer" à la Régie du logement. S'il ou elle ne réagit pas, le bail est reconduit automatiquement mais sans augmentation. Dans tous les cas, il faut se préparer pour pouvoir argumenter.

Pour plus d'information, le Comité populaire a publié sur son site un résumé des démarches à faire. Dans le doute, ou si vous avez plus de questions, nous vous invitons fortement à contacter le comité logement ou association de locataires de votre secteur.



Comme on dit dans les manifs: Le logement est un droit, locataire défends-toi ! (parce que personne ne le fera à ta place).

mercredi 9 janvier 2008

Y'a encore de l'espoir...

On apprenait ce matin, dans Le Soleil, que 66 % des Québécois [sont] opposés à la mission en Afghanistan. Malgré la propagande de l'armée et du gouvernement, le deux tiers des gens sont contre l'occupation de l'Afghanistan. Pas mal, non?

Depuis un an, le niveau d’opposition des Québécois à la mission canadienne en Afghanistan valse entre 60 % et 70 %, selon les sondages.

Bien sûr, dans notre belle région, il n'y a que 55% des gens qui sont opposé à la guerre. «Avec la base militaire de Valcartier à proximité, ce n’est pas étonnant, on s’identifie plus facilement aux militaires», note dans le journal le sondeur Raynald Harvey, qui ajoute que la capitale est probablement une des seules régions où des médias ont ouvertement fait campagne en faveur de la mission en Afghanistan.

N'empêche, même à Québec, une majorité de québécois s'opposent à la guerre. Y'a encore de l'espoir...

mardi 8 janvier 2008

DVD - The Bubble / Ha Bua

J'ai loué ce film sans trop savoir à quoi m'attendre. Un film israélien qui se rend jusqu'ici, pourquoi pas? J'ai bien fait.

La bulle dont il est question dans le titre c'est celle que se construisent les habitantEs de Tel-Aviv, quand ils font semblant de vivre dans une quelconque ville occidentale normale, comme si de rien n'était. Ici on suit des jeunes dans la vingtaine, tout ce qu'il y a de plus branché, petits-bourges marginaux et assez à gauche. Trois colocataires plus précisément, deux gays et une hétéro, amateurs de raves et d'action politico-culturelle cool. Ça pourrait être n'importe où: sur Le Plateau où dans Saint-Jean-Baptiste; à New York où Londres. Mais c'est à Tel-Aviv.

À Tel-Aviv, l'impérialisme et le pillage du Tiers-Monde qui rendent le mode de vie des occidentaux possible, tout comme la résistance, c'est la porte d'à côté. Et ça risque de vous péter dans la face beaucoup plus souvent que par ici. Là bas, les actualités internationales s'invitent au coin de la rue où à un jet de pierre. La bulle dont il est question dans le titre crève à tous les niveaux quand l'un des colocs tombe amoureux d'un palestinien. Le reste en découle.

The bubble présente une perspective intéressante et, en ce qui me concerne, inédite: un point de vue israélien, jeune, branché et à gauche sur les conflits qui secouent le moyen-orient. On pourrait surement trouver à redire sur le propos et la perspective unilatérale mais, le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est rafraichissant. C'est à voir. En Hébreu sous-titré.

The Bubble d'Eytan Fox. Avec Ohad Knoller, Yousef Sweid, Daniela Wircer, Alon Friedman. 2006.

Pour en savoir plus: Libération avait fait une critique intéressante.

lundi 7 janvier 2008

Dico anticapitaliste : « L’Etat »

Définir de façon incontestable ce qu’est l’État n’est pas aisé, tant ce mot peut avoir des contextes différents. Pour tourner la difficulté, nous proposons de reprendre la définition « en négatif » donnée par l’anthropologue Pierre Clastre à propos des sociétés indiennes d’Amazonie qui « ne connaissent pas l’État, ou, à mieux dire, ne présentent pas trace d’un pouvoir détaché de l’ensemble social, d’un pouvoir exercé par un homme ou un petit nombre sur le reste des hommes ». Nous avons là, sans aucun doute, le bon point de départ pour une réflexion sérieuse sur l’État.

Ce que Clastre met en lumière, c’est que l’État est synonyme de pouvoir d’une minorité. Les États « démocratiques » s’appliquent à masquer cette réalité. Les élections sont censées permettre à la majorité d’y décider, au moins, des grandes orientations politiques. Mais dans les sociétés capitalistes le véritable pouvoir, le pouvoir économique, échappe au contrôle des institutions politiques. Il impose à la société toute entière ses orientations. Le rôle des responsables politiques est restreint, pour l’essentiel, à la gestion des conséquences sociales des décisions des capitalistes. En sanctuarisant le droit de propriété privée des moyens de production, la Constitution de l’État garantit la suprématie politique de la classe possédante. L’État bourgeois est le chef d’orchestre du capitalisme, et l’instrument des capitalistes.

Avant 1990, les États liés à l’URSS se disaient « États ouvriers », signifiant par là qu’à travers eux, c’est le prolétariat qui exerçait le pouvoir. Ce mensonge n’a jamais trompé que celles et ceux qui voulaient être trompés. Dans tout État, c’est bien le pouvoir – plus ou moins occulte – d’une minorité qui s’exerce. Et une minorité au pouvoir l’exerce toujours pour défendre ses intérêts propres, et pas ceux de l’ensemble de la société.

Néanmoins parmi les fonctions assumées par les États, certaines paraissent, plus ou moins, défendre l’intérêt général. Exemple type : les services publics. Certains services publics ont été en premier lieu des « services de l’État » (la Poste, l’Éducation nationale) Mais les services publics sont souvent une anomalie au sein de l’économie de marché, qui a été imposée sous la pression du prolétariat.

D’une part une analyse plus fine de cette institution, telle que l’a réalisée Pierre Bourdieu en démontrant que l’école est un rouage fondamental dans le processus de reproduction sociale, permet largement de nuancer ce « sentiment ». D’autre part, même si les capitalistes accaparent l’essentiel du pouvoir, ils sont bien obligés de tenir compte du rapport de forces et les avancées sociales sont en fait, pour l’essentiel, le résultat des luttes politiques et économiques des classes dominées. Il n’empêche que n’importe quelle société sera dans l’obligation de gérer de nombreuses fonctions assumées aujourd’hui par l’État.

Les États sont nés au moment même où sont apparues les classes sociales. L’État est une forme politique qui permet à la classe dominante d’exercer son pouvoir. Quand les anarchistes affirment qu’ils veulent détruire l’Etat, ils affirment simplement qu’ils veulent construire une autre forme d’organisation politique, basée sur l’égalité économique et politique entre tous les citoyens.

Texte de Jacques Dubart
Publié dans Alternative Libertaire no 167 (nov. 2007)

dimanche 6 janvier 2008

À signaler: La «Plate-forme» a 80 ans

(via La Commune



Il y a quatre-vingts ans
Mémoire : Avec la « Plate-forme », l’anarchisme tente la rénovation


Le traumatisme de la Première Guerre mondiale, l’expérience de la révolution russe et l’échec de la vague révolutionnaire de 1919-1920 en Europe ont entraîné de profondes remises en question pour le mouvement ouvrier.

L’anarchisme n’y a pas échappé, et plusieurs tentatives de rénovation théorico-pratique ont existé à partir de 1919, que ce soit avec le « premier Parti communiste » de Raymond Péricat ou avec la Fédération communiste libertaire du Nord (FCL) de Georges Bastien [1]. En Italie, c’est la revue Pensiero e Volontà animée par le vieux Malatesta, Fabbri et Camillo Berneri, qui s’est attaquée à la doxa kropotkinienne. La dernière de ces tentatives, la Plate-forme des anarchistes russes en exil, publiée en juin 1926, est la plus aboutie et la plus ambitieuse. C’est également celle qui va déchaîner le plus de polémiques.

Lire la suite...

samedi 5 janvier 2008

Après les partys Tupperware, les soirées Taser



Un article d'Associated Press fait état d'une nouvelle mode aux États-Unis : après les soirées Tupperware et les soirées de démonstration Avon ou d'accessoires érotiques, voici les soirées Taser ! Des ami(e)s se réunissent dans le salon d'une résidence et un vendeur ou une vendeuse indépendant(e) fait la démonstration des qualités du nouveau C2, nouvelle la version civile (mais tout aussi puissante) de l'arme à impulsion électrique vendue par Taser International. Il faut savoir que seulement huit états aux USA interdisent la possession par des civils de telles armes, lesquelles se déclinent maintenant dans diverses palettes de couleur, dont le rose, en plus de ne plus avoir l'air d'un pistolet mais plutôt d'un rasoir ou d'un téléphone cellulaire, toujours dans le cas de la version vouée au grand public.... Plus de détails ici.

À signaler: «Où règne l'autorité en toute impunité»

Nos camarades de la NEFAC-Montréal ont traduit et mis en ligne l'essai principal du dernier numéro du <Northeastern Anarchist, la revue anglophone de la fédération. Il s'agit d'une étude anarchiste de l'organisation sociale et politique historique des Iroquois.

À lire: «Où règne l'autorité en toute impunité» - Une étude anarchiste de la politie Rotinonshón:ni

À signaler: «Presque quarante plus tard, mais on n’oublie pas»

(via L'Endehors)

Divergences, la revue libertaire internationale en ligne, a publié un très beau texte de Paco Ignacio Taibo II sur le 1968 mexicain. Le célèbre auteur de polar (*) revient sur la grève générale de 123 jours des étudiantEs mexicainEs, sur la sanglante répression, bien sûr, mais aussi sur les formes mêmes de la lutte et sur l'impact qu'elle a eu sur toute une génération. Un travail de mémoire qui ouvre une fenêtre sur un autre possible.

Au cours des dernières semaines, j’ai de nouveau raconté ma version du mouvement de 1968. Mettant à dure contribution ma mémoire, fouillant dans mes souvenirs, j’ai essayé d’interpréter et osé quelques définitions. J’ai parlé sur un marché, à un stand de livres sur la grand-place de Tlalpan ou dans une école. À chaque fois, le lieu est bondé, il y a des gens assis par terre, agglutinés debout aux derniers rangs. Les gens ont les yeux qui brillent. Non pas à cause de mes dons d’orateur, mais parce que j’invoque un fantôme.

À lire : Presque quarante plus tard, mais on n’oublie pas





(*) Si vous ne connaissez pas le bonhomme, je ne peux que vous conseiller la lecture de La bicyclette de Léonard, un polar délirant mettant en vedette, dans le désordre, un mercenaire américain qui fait du trafic de drogue au Viêtnam, un anarchiste barcelonais des années vingt, un Bulgare louche, et Léonard de Vinci.